« Nous ne supporterons pas ces vagues d'amis qui meurent sans agir », a écrit l'activiste canadien de lutte contre le sida, Michael Lynch dans son poème « Cry » en 1989. Et c’est certainement ce qu’a fait feu ce poète et professeur.

Décédé à l'âge d’à peine  46 ans, Michael Lynch a quand même eu un impact durable grâce à son travail qui a donné le coup d’envoi au soutien et à l’éducation sur le sida, en laissant une histoire d'espoir qui dure jusqu’à présent  - 25 ans après avoir succombé à la maladie qu'il a combattue jusqu'à la fin.

« Michael a joué un rôle central dans l’organisation de la communauté gaie quand la crise du sida a fait son apparition au début des années 1980, a écrit la  journaliste Ann Silversides à propos de son cousin. “AIDS Activist: Michael Lynch and the Politics of Community.” 

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« Il avait déjà joué un rôle de premier plan dans le mouvement de libération gaie dans les années 70; il était donc bien connu et politiquement expérimenté. Lorsque l'épidémie a frappé, il a aidé à mettre en place d’importantes organisations - le AIDS Committee of Toronto et, quelques années plus tard, le AIDS Action Now! Il a également été la force motrice derrière la création du AIDS Memorial à Toronto. »

La maladie a été, après tout, une affaire personnelle pour Michael Lynch bien longtemps avant qu'il n’ait eu à la combattre lui-même. Il a révélé son homosexualité après que lui et son ex-épouse Gail aient déménagé à Toronto de l'Iowa, avec leur fils Stefan en 1971, pour son travail en tant que professeur d'anglais à l'Université de Toronto.

Et il a vécu dans la peur de contracter le sida car il avait perdu ami après ami à cette maladie.

« Mes poèmes », a dit le natif de la Caroline du Nord à un intervieweur, « traitent de la perte et du genre de colère que l’on ressent à la mort de tant de gens quand on sait que cela n’a pas de sens, ou que c’est une période dans l'histoire où nous devrions pouvoir l’empêcher. »

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Michael Lynch a été le premier professeur au Canada à enseigner un cours d'études gaies, et il a fondé la Toronto Gay Academic Union, la Gay Fathers of Toronto, et le Centre de Toronto pour les études gaies et lesbiennes.

Il a été également « l'un des premiers à écrire critiquement sur le sida », selon le  Canadian Medical Association Journal (CMAJ).

« Sous la direction de Michael Lynch, la communauté gaie a clairement joué un rôle de premier plan dans la première partie de la maladie émergente. En fin de compte, ce ne sont pas les autorités de santé, mais la communauté gaie, [par le biais du AIDS Committee of Toronto], qui a entrepris les premières campagnes sur l’éducation et l’adoption de relations sexuelles plus sécuritaires », selon la JAMC, à en juger par les fréquents articles d’universitaires publiés dans le magazine du mouvement de libération gaie de Toronto " The Body Politic "

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Michael Lynch a reconnu, après tout, l'importance de serrer les rangs pour faire face à la crise.
« Nous sommes la première communauté à faire face à la souffrance et à la mort sur une grande échelle », a-t-il écrit à propos de la communauté gaie urbaine en proie aux affres de la maladie. « Mais nous avons dû apprendre beaucoup et vite sur cette maladie mortelle et sur son caractère indicible. »

Son diagnostic de séropositivité n’a fait qu’attiser le feu. Son fils Stefan a dit à la NPR en 2010 que l'activiste et ses amis « ont modelisé pour moi la manière de survivre une épidémie, même si en même temps, ils étaient en train de mourir. » 

Ce modèle de comportement n'a pas été que pour en faire montre. Quand Michael Lynch a révélé qu’il était séropositif lors d'un documentaire à la CBC-Radio sur "le SIDA et les Arts," il a dit : « Je suis séropositif, et beaucoup de gens que je connais le sont également, et nous savons très bien que demain nous pourrions nous réveiller avec une lésion ou quelque chose. »

Cette mortalité en tant que réalité, a-t-il poursuivi, « ajoute, comme on pourrait s'y attendre, un peu d'urgence, bien qu’elle revigore. Je ne me suis jamais senti aussi revigoré par la vie d’une journée à l’autre, et écrire en fait partie aussi ... l’on veut que les quelques mots qu’on laisse derrière nous comptent. »

Et de toute évidence, ils comptent.

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