Selon un nouveau rapport publié mardi par l’organisation environnementale Ellen MacArthur Foundation, l’industrie de la mode pourrait tripler sa production mondiale d’ici à 2050, pour atteindre plus de 160 millions de tonnes de vêtements.

Le rapport indique que cela provoquerait des niveaux catastrophiques d’émissions et de pollution.

« L’industrie textile actuelle est construite sur un modèle linéaire dépassé, qui consiste à prendre, faire et jeter, et implique énormément de gaspillage et de pollution », explique Ellen MacArthur à The Guardian. « Nous avons besoin d’une nouvelle économie du textile dans laquelle les vêtements sont conçus différemment, portés plus longtemps, recyclés et réutilisés bien plus souvent. »

La créatrice de mode Stella McCartney, connue pour ses prises de position environnementales et l’adoption de pratiques durables au sein de sa propre marque, a rejoint la fondation pour appeler à une refonte majeure des pratiques mondiales et des attentes des consommateurs.

« Le rapport présente une feuille de route pour nous permettre de créer de meilleures entreprises pour un environnement meilleur », précise Stella McCartney dans un communiqué de presse. « Il engage un dialogue qui nous permettra de trouver comment travailler ensemble afin d’améliorer notre industrie, pour l’avenir de la mode et pour l’avenir de la planète. »

Le rapport contient de nombreuses statistiques alarmantes, affirmant notamment que seulement 1 % des vêtements sur Terre sont recyclés. Le reste (à raison de l’équivalent d’un camion à ordures par seconde) est brûlé ou mis en décharge.

Cela fait de l’industrie de la mode l’un des secteurs les plus polluants au monde, et selon le rapport, son bilan de pollution ne se limite pas aux décharges.

Selon le rapport toujours, chaque année, un demi-million de tonnes de microfibres se retrouvent dans les cours d’eau du monde entier et contaminent la faune et la flore aquatique. La nature fragmentée de l’industrie de la mode (avec la conception dans un pays, la production dans d’autres et la vente dans d’autres encore) entraîne d’énormes quantités d’émissions de CO2 dues au transport et à la consommation d’énergie.

Les émissions mondiales des entreprises textiles s’élèvent actuellement à plus de 1,2 milliard de tonnes par an, soit plus que l’ensemble des vols et des transports maritimes réunis, indique le rapport.

En définitive, c’est la fast fashion qui est à l’origine des problèmes de l’industrie, avec une tendance à la production et au renouvellement rapides, affirme le rapport.

Selon le cabinet de conseil McKinsey, la quantité d’unités de vêtements produites dans le monde a doublé depuis 2000, et la durée d’utilisation de chaque vêtement a diminué de 36 % au cours des 15 dernières années.

Selon le World Resources Institute, 20 vêtements sont fabriqués par habitant chaque année.

Mais pour The Guardian, transformer l’industrie est une autre paire de manches.

Le rapport invite les entreprises à utiliser des matériaux plus durables, tels que les fibres naturelles, mais appelle aussi les consommateurs à porter leurs vêtements plus longtemps et à en acheter moins. Ces derniers peuvent également adopter de nouvelles pratiques, comme la location de vêtements à court terme pour prolonger leur durée de vie.

Une telle approche pourrait faire chuter les revenus de ce secteur de 2 400 milliards de dollars, toutefois le rapport signale que l’alternative n’est pas viable, et que de meilleures pratiques pourraient même permettre aux entreprises d’économiser 500 milliards de dollars par an.

L’effort de réforme de l’industrie de la mode se poursuit et certains signes montrent que les marques réagissent.

Des entreprises telles que Patagonia, Eileen Fisher et Stella McCartney ont adopté un modèle de production durable, comme le montre le documentaire The True Cost, qui explore le bilan environnemental de l’industrie de la mode.

D’autres grandes marques comme Levi’s, Adidas et H&M commencent à intégrer des matériaux plus durables dans leurs cycles de production.

Toutefois, le rapport alerte que ces efforts sont trop isolés et souvent incomplets, voire superficiels. Dans les années à venir, de nouveaux marchés considérables devraient apparaître en Afrique et en Asie, entraînant une augmentation toujours plus effrénée du rythme de la fast fashion.

Par ailleurs, selon un article du Huffington Post, une trop grande partie de l’industrie adopte un soutien de façade à la durabilité. Le journal affirme en effet que la nature multinationale de l’industrie de la mode repousse les coûts environnementaux sur les pays moins réglementés.

Par exemple, une grande partie de la production a été déplacée vers des pays peu réglementés, comme l’Inde, où l’utilisation de pesticides par les cultivateurs de coton a provoqué de graves conséquences pour la santé de ces derniers et où les tanneries de cuir polluent fortement les rivières et les sols.

Le rapport conclut que le véritable changement aura lieu lorsque des réglementations seront appliquées dans le monde entier pour limiter la pollution et améliorer les conditions de travail, et lorsque les entreprises repenseront leurs chaînes d’approvisionnement.

« Le moment est venu d’opérer une transition vers un système textile qui donne de meilleurs résultats sur le plan économique, sociétal et environnemental ».

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Par Joe McCarthy