La société pétrochimique et énergétique Shell a été critiquée pour son projet d'exploration de combustibles fossiles sur la Côte Sauvage d'Afrique du Sud. Cette exploration est susceptible de porter atteinte à l'environnement et de nuire à la biodiversité naturelle.

Une pétition a été mise en place par la coalition Oceans Not Oil - des citoyens et des organisations ont décidé de s'unir pour s'opposer à la forte dépendance de l'Afrique du Sud vis-à-vis des combustibles fossiles - et a été envoyée au ministère des Forêts, de la Pêche et de l'Environnement. La pétition, ainsi qu'une lettre de citoyens préoccupés, a ensuite été adressée au ministre des Ressources minérales et de l'Energie, Gwede Mantashe, pour lui demander de retirer son approbation de l'étude sismique. La pétition a recueilli près de 400 000 signatures le 5 décembre 2021.

Les écologistes, les défenseurs de la faune marine et des citoyens ont organisé de nombreuses manifestations (plus de 60 en janvier 2022) dans les rues et sur les plages d'Afrique du Sud, notamment au Cap, à Johannesburg et à Plettenberg Bay, où l'enquête doit être menée.

Ils s'inquiètent des dommages supplémentaires que les combustibles fossiles causeront à l'environnement, de la pollution sonore qui sera créée, de la vie marine qui sera menacée  (y compris celles d’espèces protégées) et la perte des moyens de subsistance des communautés déjà défavorisées.


Trois faits importants concernant les projets d'exploration de Shell

  1. La prospection sismique de Shell implique de fortes explosions sous-marines, pouvant atteindre les 220 décibels, auxquelles la vie marine sera exposée.

  2. Les conséquences seront dévastatrices pour les habitants et les entreprises qui dépendent de l'écotourisme et de la pêche.

  3. Si l'exploration prévue est couronnée de succès, les combustibles fossiles continueront d'être utilisés comme source d'énergie.


Rappel des événements

Le 21 novembre, des militants de tout le pays ont commencé à protester contre l'arrivée sur les côtes sud-africaines de l'"Amazon Warrior", le navire d’exploration. Depuis lors, la bataille n'a cessé de s'intensifier. D'autres manifestations ont eu lieu pendant le  mois et de plus en plus de citoyens se sont mobilisés pour s'opposer à la prospection des combustibles fossiles par Shell, qui doit être menée par Shearwater GeoServices pour le compte de la compagnie pétrolière.

Le 29 novembre, des activistes environnementaux et des droits de l'homme appartenant à Greenpeace Afrique, Natural Justice, la Border Deep Sea Angling Association et le Kei Mouth Ski Boat Club ont déposé une requête en justice contre le géant pétrochimique afin de stopper l'entreprise dans son élan.

Hélas, le 3 décembre, le tribunal sud-africain a donné raison à la multinationale, suscitant l'indignation des écologistes et des citoyens préoccupés par la situation.

Shell avait déjà commencé la prospection le 8 décembre 2021, malgré les protestations des écologistes, des militants des droits de l'homme et des communautés de pêcheurs inquiets.

Cependant, le 28 décembre, la Haute Cour de Makhanda a décidé d'interrompre les explorations, Shell n'ayant pas obtenu les autorisations environnementales nécessaires. La société a depuis cessé ses travaux d'exploration le temps d'examiner le jugement de la cour et affirme respecter la décision de la cour.

Qu'est-ce qu'une étude sismique ?

Une étude sismique est une exploration ou une recherche souterraine de gisements de pétrole ou de gaz. Selon une déclaration faite sur le site officiel de Shell, la société souhaite superviser une étude sismique 3D au large de la côte du Cap oriental de l'Afrique du Sud (sur laquelle se trouve la Côte Sauvage) afin d'explorer les réserves d'hydrocarbures potentielles sous le fond marin.

En bref, le navire sismologique de Shell tirera des canons à air toutes les 10 secondes pendant 24 heures afin d'atteindre les profondeurs des fonds marins. Ces tirs produiront des ondes de choc extrêmement fortes qui pénétreront à 3 km de profondeur dans l'eau et à 40 km dans la croûte terrestre, sous le fond de la mer.

Le Daily Maverick a même révélé que l'étude sismique n'est pas le seul projet d'exploration offshore prévu le long de la côte sud-africaine. En effet, quatre études sont prévues et attendent d'être lancées.

Quelles sont les personnes les plus directement touchées et pourquoi ?

Selon Sun International, la Côte Sauvage est l'une des plages les plus préservées d'Afrique australe. Si le processus est en cours, ce que l'on peut assurer, c'est que la faune marine sera perturbée et potentiellement endommagée.

Les animaux qui pourraient être perturbés par cette activité sont, entre autres, les dauphins, les tortues, les œufs de poissons et les calmars, mais ce sont surtout les baleines à bosse en migration qui se reproduisent dans la région qui seront les plus affectées. En outre, les moyens de subsistance des pêcheurs et des communautés dont les activités dépendent de l'écotourisme seront fortement touchés. 

Dans un entretien accordé au Daily Maverick, Carmen Mannarino, directrice de programme de Masifundise Development Trust, une organisation qui soutient les communautés de pêcheurs locaux dans leurs efforts pour obtenir une reconnaissance légale, a déclaré que les communautés du Cap-Oriental se sont battues longtemps et durement pour obtenir leurs droits de pêche et que ceux-ci ne devraient pas être vendus à des fins lucratives. Elle a ajouté que des membres de la communauté dépendent également de cette zone pour poursuivre leurs pratiques culturelles.

"Comme nous l'avons constaté dans d'autres régions du pays et du monde, ce type d'activités peut être très déstabilisant pour la faune marine, et perturber les schémas de migration et de déplacement des espèces de poissons. Il en résulte que les communautés de pêcheurs n'ont pas le même accès et que les récoltes sont réduites", a déclaré Carmen Mannarino.

Cette prospection intervient dans un contexte où le reste du monde se concentre sur la réduction des émissions de carbone pour lutter contre la crise climatique. Les dirigeants sud-africains et mondiaux se sont engagés, lors de la conférence sur le climat, la COP26, à réduire considérablement les émissions de carbone dans les années à venir. De fait, l'Agence internationale de l'énergie a prévenu qu'aucun nouveau projet impliquant des combustibles fossiles ne pouvait être mis en œuvre si le monde voulait atteindre des émissions nettes nulles d'ici 2050 et lutter contre le changement climatique.

Du côté de Shell

Shell affirme qu'en réalisant cette étude, elle agit dans le cadre de la loi, mais cela ne signifie pas qu'elle agit dans l'intérêt de l'environnement.

Le représentant juridique de Shell, l'avocat Adrian Friedman, a déclaré que les études sismiques sont menées dans le monde entier depuis plus de 50 ans et qu'elles font l'objet de recherches scientifiques approfondies évaluées par des pairs depuis 15 ans.

Le ministre des Ressources minérales et de l'Energie, Gwede Mantashe, a pris la défense de l'exploration.  "L'Afrique mérite une chance égale de développer ses économies grâce à ses ressources naturelles", a déclaré Mantashe lors d'un point de presse. Et ce, bien que le président Cyril Ramaphosa se soit engagé à ce que le pays abandonne la consommation de charbon et de combustibles fossiles lors de la COP26.

Quelles actions pouvez-vous entreprendre ?

Apportez votre soutien aux écologistes et aux défenseurs de l'environnement en participant à leurs manifestations et en signant leurs pétitions. Vous pouvez également utiliser les réseaux sociaux pour vous exprimer et ainsi sensibiliser les personnes de votre entourage afin que les entreprises soient tenues pour responsables. 

Vous pouvez également rejoindre la campagne Défendre la planète de Global Citizen, en passant à l'action avec nous pour inciter les chefs d'entreprise et les dirigeants mondiaux à donner la priorité à la planète, à réduire les émissions de carbone, à mettre fin à la dépendance aux combustibles fossiles, à financer les efforts d'adaptation et d'atténuation, etc.

Global Citizen Explains

Défendre la planète

Exploration sismique de Shell en Afrique du Sud : Pourquoi les citoyens protestent-ils ?

Par Tshiamo Mobe