Par Emma Batha

LONDRES, 22 juin (Fondation Thomson Reuters) — Le taux de condamnation pour viol en Suède a augmenté de 75 % en deux ans suite à un important changement législatif, incitant les autres pays à revoir leur législation.

En 2018, la Suède a modifié la définition légale du viol pour y inclure les relations sexuelles non consenties. Contrairement à de nombreux pays, les procureurs n'ont pas à prouver l'usage ou la menace de violence ou de coercition.

Le Conseil national de la prévention de la criminalité (Bra) a déclaré que l'augmentation des condamnations (qui sont passées de 190 en 2017 à 333 en 2019) montrait que le changement avait eu un impact plus important que prévu.

« Nous avons été surpris de constater une telle augmentation », a déclaré lundi Stina Holmberg, chargée de recherche au Bra.

« C'est un bon signe. Cela a permis de rendre une meilleure justice aux victimes de viol », a-t-elle déclaré à la Fondation Thomson Reuters, ajoutant qu'elle espérait que la loi encouragerait les discussions sur la question du consentement dans les écoles et les ménages.

Les militants des droits des femmes ont appelé les autres pays à suivre l'exemple de la Suède.

« Il est urgent que d'autres pays suivent cet exemple, a déclaré Katarina Bergehed, conseillère politique principale pour les droits des femmes à Amnesty International en Suède. Les relations sexuelles doivent être consensuelles. Tout le reste est un viol. »

La Grande-Bretagne, la Belgique, le Canada, Chypre, l'Allemagne, la Grèce, l'Islande, l'Irlande et le Luxembourg définissent déjà le viol comme une relation sexuelle non consentie, tandis que le Danemark, la Finlande, l'Espagne et le Portugal ont promis des réformes similaires.

Selon Mme Bergehed, la plupart des gens pensent encore que le viol est une agression commise par un inconnu, mais un examen des affaires judiciaires en Suède a montré que la plupart des victimes connaissaient leur agresseur.

« Ces stéréotypes n'aident pas les victimes à avancer, ils les empêchent de savoir si elles ont vraiment vécu un viol ou non », a-t-elle ajouté.

Mme Bergehed a affirmé que de nombreuses femmes se reprochaient également ce qui leur était arrivé, notamment dans les cas où elles sont restées figées et n'ont pas riposté. La police et les tribunaux mettent souvent en cause le récit d'une victime si celle-ci n'a pas réagi, mais il est de plus en plus évident que de nombreuses victimes souffrent d'une paralysie temporaire lorsqu'elles sont violées.

Selon Mme Bergehed, une étude menée par une clinique d'urgence suédoise pour les victimes de viols révèle que 70% d'entre elles ont ressenti une « crainte paralysante ».

Si elle a salué l'augmentation du nombre de condamnations, Mme Bergehed a déclaré que le nombre global de condamnations restait « scandaleusement bas ». Le nombre de viols signalés est passé de 4 895 en 2017 à 5 930 en 2019, mais, selon elle, ces chiffres ne constituent que la partie visible de l'iceberg. Elle affirme que les crimes sexuels sont rarement prioritaires et les enquêtes sont souvent entachées d'irrégularités, ce qui signifie que peu de cas sont jugés.

La police a déclaré l'année dernière qu'elle allait recruter de nouveaux employés pour se concentrer sur les crimes sexuels et la violence domestique.

La loi suédoise sur le viol de 2018 a également introduit une nouvelle infraction de viol par négligence, dans les cas où les tribunaux estimeraient que le consentement n'avait pas été établi, mais que l'auteur n'avait pas eu l'intention de commettre un viol. Le bilan du Bra indique que 12 personnes ont été condamnées pour ce délit.

Selon Mme Holmberg, la Cour suprême doit fournir des directives plus claires aux tribunaux inférieurs sur ce délit.

Article d'Emma Batha @emmabatha ; édition par Helen Popper. Veuillez créditer la Fondation Thomson Reuters, la branche caritative de Thomson Reuters qui se penche sur la vie des personnes qui, dans le monde entier, luttent pour vivre librement ou équitablement. Consultez le site http://news.trust.org

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Les condamnations pour viol sont en hausse de 75 % suite à un changement de loi en Suède