Plus de vingt ans après la décision de la Cour suprême du Canada, selon laquelle les communautés autochtones peuvent se livrer à une pêche à des fins de « subsistance convenable » en dehors des règles de pêche commerciale, le peuple Mi'kmaw du sud-ouest de la Nouvelle-Écosse a lancé une petite entreprise de pêche au homard dans les semaines précédant la saison officielle, qui débute en novembre.
Les Mi'kmaq ont mis en place quelque 500 casiers à homards. En comparaison, les navires de pêche commerciale du Canada comptent collectivement plus de 900 000 casiers dans l'océan Atlantique.
Les pêcheurs commerciaux de la région sont toutefois furieux que les Mi'kmaq exercent leur droit de pêche, affirmant que le projet menace les populations de homards. Ils se sont donc lancés dans des actes de violence pour saboter cette tribu.
Selon le magazine Hakai, les conservationnistes affirment que l'expédition Mi'kmaw ne menace pas les populations de homards, qui sont en très bonne santé, surtout si l'on considère l'ampleur de la pêche commerciale.
Ces dernières semaines, les pêcheurs commerciaux ont effectué des raids dans les entrepôts mi'kmaw pour y détruire les prises. Selon CBC, ils ont également mis le feu à des bateaux et des fourgonnettes mi'kmaw, tiré des torchères sur les bateaux de pêche mi'kmaw, empêché leurs bateaux d'atteindre le rivage et retiré avec force leurs filets.
[Conflit de pêche en Nouvelle-Écosse]
— Geneviève Normand (@GeNormand) October 15, 2020
Voici la lettre que le chef de la Première Nation Sipekne’katik a fait parvenir à @JustinTrudeau aujourd’hui. pic.twitter.com/3NnchWSVrI
Ces violences ont suscité une prise de conscience dans la région quant à la souveraineté autochtone, au rôle du gouvernement, à la question de la conservation et au racisme répandu au Canada. Les communautés autochtones du Canada s'insurgent depuis longtemps contre l'incapacité du gouvernement à leur garantir des droits humains fondamentaux tels que l'accès à l'eau, aux ressources naturelles et aux soins de santé, ainsi que leur droit à vivre sans violence ni discrimination.
tonight in southwestern Nova Scotia, a van owned by a Mi'kmaw fish harvester set on fire. video: Facebook. @APTNNewspic.twitter.com/9jzPefCPjU
— angel moore (@angelharksen) October 14, 2020
Jeudi, le ministre des Services aux Autochtones, Marc Miller, a condamné les attaques contre les Mi'kmaq.
« Je ne peux pas clore cette conférence ... sans aborder les incidents survenus dans le sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, qui constituent une agression contre le peuple Mi'kmaw », a déclaré M. Miller lors d'une conférence de presse.
« Ces actes de violence inacceptables, y compris l'agression du [chef] Sack [qui a été la cible] de menaces et d'intimidation, dans certains cas de nature raciste, ne peuvent en aucun cas entraver le droit de ces personnes à une subsistance convenable », a-t-il ajouté.
La violence ne peut pas et n’entravera pas le droit des Mi’kmaq d’assurer un niveau de subsistance raisonnable. #polcanhttps://t.co/lgSA1cSSOk
— Marc Miller (@MarcMillerVM) October 18, 2020
Le chef Mike Sack a été agressé par des pêcheurs lors d'un raid sur l'enceinte des Mi'kmaq.
La police de la région n'a pas procédé à une seule arrestation pour les violences perpétrées contre le peuple Mi'kmaw, même si des officiers de police ont été témoins de certaines d'entre elles, rapporte CBC.
Les Mi'kmaq demandent au gouvernement fédéral d'intervenir et de protéger leurs droits à gagner une vie modeste, tels que garantis par la Cour suprême.
« Vous savez, ils sont assis dans leur bureau, aussi en sécurité que possible, disant que nous avons besoin de sécurité ici, a affirmé M. Sack à CBC. Envoyez les forces de l'ordre. Faites votre travail. Protégez les Canadiens. Nous sommes tous des Canadiens. Venez ici, protégez-nous et ne vous contentez pas de tweeter à ce sujet. »
« Nous en sommes au stade où on se demande si notre vie a de l'importance », a-t-il ajouté.
Alors que les tensions s'intensifient, les dirigeants autochtones appellent le ministère des Pêches et des Océans, le gouvernement fédéral et les forces de police à intervenir pour résoudre la situation.
Faute de quoi, le conflit pourrait s'ajouter à la longue liste des injustices dont sont victimes les populations autochtones du Canada, qui n'ont pas obtenu réparation.