Avant l’approbation du vaccin contre la COVID-19 de Pfizer et BioNTech en décembre 2020 par l’Agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux (FDA), jamais une homologation et une production de vaccin n’avaient été aussi rapides.
Auparavant, le délai le plus court pour le développement et l'approbation d'un vaccin était, en moyenne, de quatre ans. Pourtant, grâce aux recherches actuelles sur d'autres coronavirus ainsi que la possibilité de s'appuyer sur la technologie ARNm, les chercheurs ont pu développer et tester plusieurs vaccins contre la COVID-19 à une vitesse sans précédent.
Fort du financement de gouvernements, de laboratoires pharmaceutiques, d'organisations philanthropiques et de la société civile, les chercheurs du monde entier ont été armés d'outils leur permettant d'accélérer leurs efforts dans la lutte contre la COVID-19.
La Coalition pour les innovations en matière de préparation aux épidémies (CEPI), qui réunit ces acteurs, est à la pointe en matière de soutien au développement rapide de vaccins contre la COVID-19 depuis début 2020. Sa mission est d'accélérer le développement de vaccins contre les maladies infectieuses émergentes et de permettre un accès équitable aux vaccins lors d’épidémies. La CEPI est un membre fondateur du Dispositif pour accélérer l'accès aux outils de lutte contre la COVID-19 (l'Accélérateur ACT), qui s'efforce d'identifier des vaccins, des traitements et des thérapies innovants contre la COVID-19, tout en renforçant les systèmes de santé mondiaux afin que personne ne soit laissé pour compte.
Le docteur Melanie Saville, directrice de la recherche et du développement des vaccins au sein de la Coalition pour les innovations en matière de préparation aux épidémies (CEPI), se tient debout à Londres le 28 avril 2021.
Le docteur Melanie Saville, directrice de la recherche et du développement des vaccins au CEPI, a joué un rôle essentiel dans la réponse à la pandémie.
Global Citizen s'est entretenu avec elle au sujet des différentes étapes du développement d’un vaccin contre la COVID-19, de la manière dont les chercheurs s’adaptent aux variants du coronavirus et de la façon dont nous pouvons garantir l'équité dans l’accès aux vaccins pour les personnes les plus vulnérables dans les pays à revenu faible et intermédiaire.
Docteur Melanie Saville : En tant que directrice de la recherche et du développement des vaccins, mon équipe est chargée d'identifier les candidats vaccins contre la COVID-19, de gérer et d'aider nos partenaires à développer des vaccins contre la COVID-19, de favoriser la science et de soutenir les projets d'immunologie, les essais pré-cliniques et les essais épidémiologiques liés à la COVID-19.
En janvier 2020, lorsque l'épidémie de COVID-19 a fait irruption, nous avons réagi immédiatement.
Après les vacances de fin d’année, je suis retournée travailler et deux minutes après être arrivée au bureau, mon patron est arrivé et m’a dit : « Mélanie, nous avons un problème. »
Le même jour, nous avons eu une réunion avec l'OMS [Organisation mondiale de la Santé] et d'autres [organisations] clés à propos de ce mystérieux virus découvert en Chine. À l'époque, nous n'étions même pas sûrs de ce que c'était, mais il était évident qu’il s'agissait d'une épidémie et que la communauté internationale devait se mobiliser. Dès lors que nous avons compris qu'il s'agissait d'un coronavirus bêta, nous avons réagi le premier jour, sans imaginer qu'il s'agissait d'une pandémie.
Plus nous attendons, plus les conséquences d'une épidémie sont importantes. Nous nous sommes donc appuyés sur le travail que nous avions effectué auparavant. Nous nous sommes adressés à nos partenaires en leur demandant de commencer à travailler le plus vite possible. Fabriquez un virus candidat, effectuez les tests précliniques dont vous avez besoin, mettez-le en phase clinique, [et] nous vous assisterons.
Nous avons commencé à nous intéresser à la vitesse et à la portée des vaccins et de leur fabrication. Il devenait évident que ce [virus] ne pourrait être endigué et que nous aurions besoin de quantités importantes de vaccins. Nous cherchions à savoir comment fabriquer des centaines de millions de doses de vaccins. L'accès à la vaccination est, en effet, au cœur de l'action de la CEPI. Lorsque nous établissons un contrat avec un fabricant, il y a une obligation de fournir des doses aux pays à revenu faible ou intermédiaire.
Les premiers investissements que nous avons réalisés concernaient des [vaccins] candidats avec lesquels nous avions déjà des contrats. C'est ainsi que nous avons pu avancer très rapidement avec les premiers vaccins candidats. Puis nous finançons les projets par le biais d'appels à projets : nous avons reçu plus de 100 demandes de projets de développement de vaccins. Nous procédons, ensuite, à des examens internes et externes en fonction de différents critères.
Nos trois principaux critères d'investissement sont la rapidité de développement, tout en veillant, bien évidemment, à ce que la rapidité ne compromette pas la sécurité, l'échelle de fabrication et le respect des principes d'accès équitable de la CEPI.
Nous finançons ceux qui, selon nous, ont les plus grandes chances de réussir, sans pour autant mettre tous nos œufs dans le même panier : nous ne sélectionnons pas uniquement les candidats ARNm, ou encore les vaccins à vecteurs viraux, ni ceux à base de protéines. À l'époque, nous ne savions pas ce qui allait fonctionner, nous voulions donc un large portefeuille.
Nous avons accordé un financement préalable à Moderna, qui a été l'un des premiers vaccins à démontrer son efficacité. Nous avons financé AstraZeneca, qui a déployé un nombre important de vaccins, et Novavax, dont nous espérons qu'il passera le cap du processus d’homologation.
Au fil du temps, une complexité supplémentaire est apparue, à savoir les variants [du coronavirus]. Nous devons donc examiner ces variants et déterminer si nous aurons besoin d'un vaccin spécifique contre eux. Nous travaillons également avec des fabricants [de vaccins] pour déterminer ce qu'il faudrait faire pour mettre au point un nouveau vaccin contre les variants.
La séquence du coronavirus a été publiée en janvier, et le premier [vaccin candidat fructueux] a fourni de bons résultats du taux d'efficacité en 300 jours. Il faudrait, probablement, une décennie pour y parvenir. C’est vraiment incroyable. La technologie a prouvé que nous pouvions aller plus vite et que nous devons continuer à suivre cette voie.
En cas de nouvelle pandémie, nous voulons atteindre l’objectif des 100 jours. Nous étudions donc différentes options technologiques pour comprendre comment aller encore plus vite, sans pour autant transiger sur la sécurité.
La sécurité est d’une importance capitale. Ce qui a permis d'être aussi rapide, c’est finalement d’avoir commencé à produire des vaccins en prenant des risques, c'est-à-dire d’augmenter la production à grande échelle, avant même d’avoir des données cliniques.
En temps normal, nous ne ferions pas cela car c’est un investissement considérable. La CEPI a pris un risque financier parce que nous ne savions pas si cela fonctionnerait, mais nous avons veillé à ce que les essais les plus pertinents soient conduits.
Le docteur Melanie Saville, directrice de la recherche et du développement des vaccins au sein de la Coalition pour les innovations en matière de préparation aux épidémies (CEPI), a joué un rôle de premier plan dans le soutien au développement rapide de vaccins contre la COVID-19 depuis début 2020.
Nous avons veillé à ce qu'il y ait des comités indépendants de contrôle des données pour examiner les résultats de façon continue. Bien que les essais se soient déroulés rapidement, avec un grand nombre de volontaires, ils se sont déroulés dans les mêmes conditions qu’en temps normal. Les données recueillies l’ont été en suivant le même protocole de sécurité que d’habitude, même si cela a probablement été plus rapide [pour les essais des vaccins contre la COVID-19].
Cela signifie qu'en réalité, le suivi doit se poursuivre après l'autorisation d’utilisation en urgence du vaccin et il est absolument essentiel que nous continuions à recueillir des données pendant toute la durée de vie du vaccin. Évidemment, dans certaines circonstances, des essais ont dû être interrompus pour des raisons de sécurité, comme c’est le cas habituellement pendant des essais cliniques. Finalement, ce que l'on cherche à connaître, c'est le bénéfice du vaccin par rapport à son risque potentiel, et il faut trouver un équilibre entre les deux.
« Following the A-Team » est une série d’articles qui met en lumière le travail de femmes qui oeuvrent sur le terrain pour combattre la COVID-19 dans le cadre du Dispositif pour accélérer l'accès aux outils de lutte contre la COVID-19 (l'Accélérateur ACT).
Lancé en avril par sept partenaires internationaux, l'Accélérateur ACT est une coalition qui vise à accroître les efforts pour vaincre la pandémie de la COVID-19. Ses membres travaillent de concert pour développer le plus rapidement possible des tests, des traitements et des vaccins, tout en renforçant les systèmes de santé les plus fragiles.
L’organisation a désespérément besoin du soutien financier des gouvernements du monde entier. Rejoignez-nous et exigez ici des dirigeants mondiaux qu’ils contribuent au financement du programme ACT-Accelerator.
Note: Cette série de témoignages a été rendue possible grâce au financement de la Fondation Bill et Melinda Gates, un partenaire de Global Citizen. Chaque article a été produit en toute indépendance éditoriale.