Par Umberto Bacchi

TBILISI, 3 septembre (Fondation Thomson Reuters) — Jeudi, six jeunes enfants et adultes portugais, qui ont été confrontés à des feux de forêt meurtriers et à des vagues de chaleur, ont intenté un procès contre 33 pays auprès de la Cour européenne des droits de l'homme. Ils affirment que l'inaction des gouvernements en matière de changement climatique met en péril leur avenir.

Les plaignants, âgés de 8 à 21 ans, veulent que les gouvernements intensifient leurs efforts pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, considérant que l'inaction de ces derniers menace leur vie et leur bien-être.

« C'est terrifiant de faire face à un incendie près de chez soi », a déclaré Catarina Mota, 20 ans, l'une des quatre candidates de la région de Leiria au Portugal, qui figure parmi les plus touchées par les incendies de 2017 ayant causé la mort de quelque 120 personnes.

« Je vis avec le sentiment que, chaque année, ma maison devient un endroit plus dangereux et qu'en vieillissant, je serai exposée à de violentes vagues de chaleur qui dureront plusieurs semaines, et cela m'effraie beaucoup », a-t-elle déclaré lors d'une conférence de presse en ligne.

Les deux autres pétitionnaires vivent à Lisbonne, qui a connu une chaleur extrême au cours des dernières années, avec des températures atteignant un record de 44°C (111,2°F) en août 2018.

« Avec le peu de temps qu'il nous reste pour mettre fin à cette situation, nous devons faire tout notre possible pour obliger les gouvernements à nous protéger correctement », a ajouté Mme Mota dans une déclaration.

Des milliers de poursuites ont été engagées ces dernières années contre des gouvernements et des entreprises dans le monde entier, mais cette affaire est la première à être portée devant la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), ont déclaré les avocats des plaignants.

La poursuite vise les 33 plus grands émetteurs de gaz à effet de serre parmi les 47 États membres de la CEDH, dont tous les pays de l'Union européenne, la Grande-Bretagne, la Suisse, la Norvège, la Russie, la Turquie et l'Ukraine, ont-ils déclaré. Selon le consortium de recherche Climate Action Tracker, ces 33 pays ne font pas assez pour atteindre l'objectif internationalement convenu de limiter le réchauffement climatique à une température bien inférieure à 2°C (3,6°F) par rapport à l'époque préindustrielle.

Les efforts insuffisants des États mettent en danger la santé physique et mentale des candidats, qui risquent d'être exposés à des conditions météorologiques extrêmes et plus meurtrières à l'avenir, a déclaré Gerry Liston, membre du réseau Global Legal Action Network, une organisation à but non lucratif qui soutient cette cause.

« Le changement climatique n'a pas seulement des effets physiques, il provoque  [aussi] une grande anxiété », a-t-il déclaré par téléphone à la Fondation Thomson Reuters. Les six militants affirment également qu'ils sont victimes de discrimination, car ce sont les jeunes qui risquent de souffrir le plus du changement climatique, qui devrait s'aggraver avec le temps, a déclaré M. Liston.

Leurs avocats espèrent que le tribunal constatera un manquement des États à leur obligation de protéger les droits des demandeurs, et qu'il les enjoindra d'intensifier les mesures de réduction des émissions tout en créant un précédent important pour les tribunaux nationaux, a ajouté M. Liston.

Alors que les gouvernements se préparent à dépenser des sommes astronomiques pour relancer leurs économies face à la pandémie de coronavirus, Mme Mota les invite à investir dans les technologies vertes plutôt que dans les combustibles fossiles.

« La plupart des pays du monde suivent les conseils des scientifiques pour lutter contre ce virus, mais les gouvernements ne suivent pas les recommandations de la science lorsqu'il s'agit de lutter contre le changement climatique », a-t-elle ajouté.

D'autres procès récents sur le climat ont donné des résultats mitigés.

En décembre, la Cour suprême des Pays-Bas a donné raison à un groupe de campagne qui demandait au gouvernement néerlandais d'agir plus rapidement pour réduire les émissions de carbone.

Cependant, en janvier, un tribunal américain a rejeté une affaire portée par 21 jeunes qui accusaient le gouvernement d'avoir porté atteinte à leurs droits à la vie et à la liberté.

Il y a un an, la militante suédoise Greta Thunberg et 15 autres jeunes ont intenté un procès à un comité des Nations Unies, affirmant que cinq des principaux pays émetteurs de gaz à effet de serre bafouaient leurs droits.

En mai, le Brésil, la France et l'Allemagne — trois des pays visés par la plainte — ont déclaré que les accusations portées contre eux n'étaient pas fondées et qu'elles n'étaient pas de leur ressort. L'affaire est toujours en cours d'examen.

(Article d'Umberto Bacchi @UmbertoBacchi ; édition par Megan Rowling. Veuillez créditer la Fondation Thomson Reuters, la branche caritative de Thomson Reuters qui se penche sur la vie des personnes qui, dans le monde entier, luttent pour vivre librement ou équitablement. Consultez le site  http://news.trust.org)

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